Ready Player One : Un chef-d'oeuvre signé Steven Spielberg

Tout le monde a son film favori. Cela peut être en raison de l’émotion qu’il vous a provoqué, ou tout simplement parce que votre acteur préféré joue dedans… Ready Player One est un film de Steven Spielberg sorti en 2018, qui est une adaptation du roman Player One d’Ernest Cline qui est sorti en 2011. Les deux ont fait un carton : le roman de Cline est très vite devenu un best-seller ; quant au film de Spielberg, la critique mondiale s’est révélée très bonne et la recette s’est élevée à près de six cents millions de dollars. Ready Player One est mon film préféré en raison du nombre de références astronomique présentes dans le film. Il y a également un côté vintage que j’apprécie particulièrement, de plus que le film se déroule dans le futur…
En bref, c’est le scénario et l’univers de l’histoire qui m’ont tout simplement envoûté. Le film dure 140 minutes, mais je vous promets qu’on ne les voit pas passer. Mettons-nous un peu dans le bain et analysons tout cela…

Attention ! Etant donné que cette critique est une analyse approfondie de certains aspects du film, il y a en toute logique la présence de beaucoup de spoilers. Vous voilà prévenus...

Un monde virtuel utopique dans un monde réel dystopique



C’est tout particulièrement ce concept-là qui m’a plu. Le film se passe en 2045. L’humanité vit sur une Terre complètement polluée. Le protagoniste de l’histoire, Wade, joué par l’acteur Tye Sheridan vit dans la ville de Colombus (Ohio) dans ce qu’ils appellent dans le film « les piles ». Entendez par-là des caravanes et des mobile-homes superposés les uns sur les autres. Les plans du début du film montrent cette triste réalité. Les couleurs sont ternes, le gris domine, certainement pour symboliser la pollution et faire contraste avec la Nature, qui n’est plus dans ce futur dystopique.

« La réalité est ennuyeuse » comme le dit Wade au début du film. L’Humanité a alors trouvé un refuge : l’Oasis. A la base lancé en tant que jeux vidéo multijoueur en VR, le jeu a pris une telle ampleur que l’ensemble des humains y jouent, et y passent plus de temps que dans la réalité. Les plans dans l’Oasis sont très colorés et contrastent avec la vraie vie.



L’Oasis est donc présentée comme une échappatoire, comme si l’Humanité regrettait ses actions et fuyait ses responsabilités face à ce futur dystopique. L’Oasis est vu dans un premier temps par le spectateur comme le Paradis, étant donné que tout est possible, comme le dit Wade au début du film : « La seule limite, c’est notre imagination ». Il y a la notion de la magie, les joueurs doivent tuer des monstres ou faire des chasses à l’artefact pour gagner de l’argent et/ou des tenues/équipements dans le jeu, enlevant alors la notion du travail pour gagner sa vie.



Présenté comme un paradis, l’Oasis est en réalité tout le contraire. L’Humanité n’a plus foi en la vie, alors ils décident de vivre dans cette illusion, qui n’est rien d’autre qu’un programme informatique comme tant d’autres. Les gens ne vont plus dehors et n’ont plus d’interactions dans le monde réel. Lorsque leur avatar meurt, ils perdent toute leur progression, tout leur argent virtuel et cela les pousse à l’agression voire même à la folie ou au suicide dans la vraie vie, comme le montrent certains plans dans le film…




James Halliday, celui qui a redonné espoir à l'Humanité



Dans le film, James Halliday, joué par Mark Rylance est le créateur de l’Oasis avec son seul ami, Ogden Morrow, joué par Simon Pegg. Aux premiers abords, il peut être vu comme quelqu’un de perché. Une sorte de savant fou, qui porte des grosses lunettes noires ainsi que des cheveux en bataille. On apprend rapidement qu’il était adoré du public, et que certains fans tel que Wade, alias Parzival de son nom d’avatar sur l’Oasis le vénèrent tel un dieu vivant.

La raison de ce culte selon moi ? Premièrement, Halliday a permis avec son jeu de faire croire à de nombreuses personnes que tout était possible. Il a peut-être même donné raison à la vie pour certains. Là où tout va mal, l’Oasis permet à l’Humanité de se réfugier dans un paradis virtuel, où ils passent la vie qu’ils ont toujours rêvés d’avoir.



Deuxièmement, Halliday n’avait jamais conçu l’Oasis dans le but de faire de l’argent. C’était avant tout un passionné qui programmait ce jeu pour le plaisir. Dans certains extraits du film qui racontent des passages de sa vie, James Halliday a des expressions du visage qui semble montrer que ce dernier est complètement déconnecté de la réalité et qu’il est totalement perdu. D’ailleurs, Halliday le dit à la fin du film : « J’ai créé l’Oasis parce que je ne me suis jamais senti chez moi dans le monde réel ». On peut également penser qu’Halliday n’avait pas du tout prévu que son jeu allait tant cartonner et il s’est senti un peu pris au dépourvu, ne savant comment réagir face à cette situation. L’argent l’importait peu, sa passion des jeux vidéo passait avant tout. Il ne s’attendait pas à toutes les conséquences que son jeu allait provoquer...



La troisième raison du culte d’Halliday est sans doute la nécessité de se documenter pour remporter les épreuves qu’il a annoncé avant sa mort, dont nous reviendrons plus tard. En effet, Halliday avait une culture des jeux vidéo, des films et de la pop-culture hallucinante, et il a incorporé pleins d’indices au sein même de l’Oasis. Une bibliothèque géante est disponible dans le jeu, permettant aux joueurs de voir tous les souvenirs de James Halliday, tous les films qu’il a vu ainsi que ces musiques préférées. Les habitants de l’Oasis ont dû se documenter et donc apprendre à connaître James Halliday pour espérer remporter les épreuves, ce qui en fait une raison de son culte.

L’Oasis, un véritable objet de convoitise




Les épreuves de James Halliday sont la principale pensée de tous les joueurs. En effet, peu après sa mort, Halliday explique lors d’une vidéo enregistrée à l'avance qu’il a caché dans son jeu un easter egg qui offrirait à celui qui le trouve le contrôle total de l’Oasis ainsi que 500 milliards de dollars. Rien que ça ! Mais ce n’est pas si facile que cela. Il faut avant trouver trois clefs qui, une fois réunies permettront d’accéder à l’easter egg. Seulement, pour obtenir ces clés, il faut remporter des épreuves, qu'il faut avant tout deviner. Ce qui oblige les joueurs à se documenter sur la vie d’Halliday ainsi qu’à toute sa culture de films et de pop.



En 2045, au moment où se déroule le film, l’entreprise IOI (Innovative Online Industries) n’a qu’une seule idée en tête : trouver l’easter egg pour avoir le contrôle sur l’Oasis et gagner beaucoup d’argent. Le PDG de l’entreprise, Nolan Sorrento, joué par Ben Mendelshon, représente dans le film l’essence même de l’humain : posséder, collectionner, avoir le contrôle. Nolan ne parle que d’argent et parle même d’envahir le jeu de publicités, dans le but de faire des bénéfices, encore et toujours. L’entreprise IOI crée des objets en lien avec l’expérience de jeu de l’Oasis. Ils vendent notamment la combinaison X1, qui permet de ressentir tout ce qui est lié au toucher et à la douleur physique dans le jeu. Cela permet à IOI d’espionner les joueurs et même de pirater leur compte s’ils ont leur mot de passe.




IOI emploie également des joueurs, tel une armée. Ces joueurs essaient de chercher et de remporter les épreuves dans l’unique but de trouver l’easter egg.
L’Oasis ne se limite pas seulement à un simple jeu. C’est une véritable puissance économique que certaines personnes désirent posséder. IOI profite de la naïveté des habitants de l'Oasis pour imposer son autorité et son grand nombre de joueurs lui permet d’être sur tous les fronts.



Parzival et ses amis font partie d’une rébellion dont le but est de faire perdre IOI. Leur but n’est pas de faire du bénéfice, mais bien de sauver l’Oasis. Cette idée d’objet de convoitise peut mener dans l’esprit du spectateur à la question suivante : est-ce-que la prochaine grande guerre sera virtuelle ? La réponse selon le film tend plutôt vers un oui. Dans le film, le mot « armée » est employé à plusieurs reprises. Le conflit ne se limite pas à quelques soldats, mais bien à une grande partie des joueurs de l’Oasis. La guerre ne se déroule pas dans la réalité, mais bien dans le jeu. Des plans montrent des gens dans le monde réel, leur casque vissé sur la tête en train de se battre. Ces plans sont à la fois comiques (ils font des grands gestes, l'humour burlesque est présent) et tragiques : l'Humanité est tellement plongée dans cette illusion qu'ils ne vivent plus que pour cela.



C’est après cette analyse que les épreuves si tordues de James Halliday prennent tout leur sens. Halliday avait pensé à toutes ces personnes qui voudraient récupérer l’Oasis pour faire de l’argent. Par précaution, il a donc créé des épreuves dont seul les fans et les personnes ayant la même mentalité que lui pourraient en percer le mystère. Ce qui en fait de lui un génie et ce qui alimente encore plus son culte.

La vie sociale au sein de l’Oasis

Nous l’avons vu au tout début, les humains passent désormais la plus grande partie de leur temps dans l’Oasis. Par conséquent, c’est ici qu’ils rencontrent les gens, interagissent avec eux et se créent des relations. Évidemment, le fait que ces rencontres se fassent virtuellement changent la façon de communiquer, et même le jugement au premier regard évolue avec ces nouveaux rendez-vous virtuels…



Cette idée apparaît au tout début du film, lorsque Parzival dit ces mots: « Voici moi dans l’Oasis. Enfin, c’est mon avatar. Enfin, jusqu’à ce que je décide de changer de coupe ». Par conséquent, les joueurs de l’Oasis peuvent montrer ce qu’ils veulent de leur véritable identité. Ainsi, les gens se côtoient sans vraiment se connaître, comme le souligne Parzival: « Aesh est mon meilleur ami dans l’Oasis, même si je ne l’ai jamais vu dans la vraie vie ». Leur avatar dans l’Oasis est la meilleure version d’eux mêmes. Ils peuvent être n’importe qui, avoir un personnage de sexe différent qu’eux dans la réalité et choisir pour la plupart d'être plus beau que dans la vraie vie. Plus de préoccupations parce qu’on se trouve trop gros, trop petit… Le joueur a le contrôle total sur son sosie virtuel idéal qui le représente en tant qu’être parfait. Malheureusement pour eux, comme je l’ai dit plus haut, l’Oasis n’est rien d’autre qu’une illusion. Ce qui rejoint de nouveau l’idée que l’Humain fuit la réalité avec lâcheté, ne l’acceptant pas ou ne se résolvant pas à la combattre tête baissée. Là où l'on pense avoir des amis au sein de l’Oasis ou des sentiments amoureux envers quelqu’un, on se rend finalement compte que l’on n’apprécie pas forcément la personne réelle, mais bien l’avatar qui le représente, autrement dit la meilleure version de cette personne… Cette réflexion ramène l’idée d’un futur dystopique que l’Homme essaie de fuir, en vain.




Un hommage à Stanley Kubrick

Steven Spielberg étant un grand réalisateur ayant une grande culture cinématographique, je pense qu’il s’est beaucoup amusé à réaliser Ready Player One, et ce en raison de la quantité exceptionnelle de référence de films, de pop-culture, de jeux vidéos… Spielberg rend également un grand hommage au cinéma de Stanley Kubrick en incorporant des détails dans le film. Dès le début, lors de la présentation de l’Oasis, une planète-casino apparaît à l'écran. Les personnes ayant un minimum de culture cinéma observeront directement que ce casino a exactement la même forme que la station spatiale dans 2001, a Space Odyssey. Coïncidence ? Je ne pense pas…



Un autre hommage, beaucoup plus flagrant se déroule vers le milieu du film. Les héros se retrouvent dans The Shining . Avec ces scènes, entièrement reproduites par Steven Spielberg , le réalisateur rend un véritable hommage à Stanley Kubrick.
Il est très comique de voir les personnages évoluer dans l’hôtel d’Overlook ; de plus que certains, dont Aesh n’ont pas vu le film. Heureusement qu’il y a ce personnage, pour éviter que les gens qui n’ont jamais vu The Shining ne se sentent largués.



Ainsi, de nombreuses scènes sont entièrement reconstituées par Spielberg, tel que la scène des jumelles, de la cascade de sang sortant d’un mur ou encore celle de la chambre 237… De nombreux décors sont également refaits, comme le grand salon ou Jack écrit son roman, la salle de bain de la chambre 237, les couloirs et ses motifs au sol si particuliers, le labyrinthe ainsi que la grande cuisine…





Ce qui est génial, c’est qu'Ernest Cline (l’écrivain du livre de l’histoire du film) a incorporé dans The Shining même l’élément de résolution d’une épreuve d’Halliday. Le film a donc été un peu remasterisé. Ainsi, la fameuse photo où Jack apparaît normalement dans le film laisse place à James Hallyday ainsi qu’à sa femme. La salle de bal est également transformée en une fosse verte géante où des zombies dansent. Enfin, les pages du roman posés à côté de la machine à écrire font office de compte à rebours pour l'épreuve avant que les héros ne soient expulsés du film. La manière dont Spielberg a tourné ces scènes sont très fidèles au vrai film, et les petites références à Halliday disséminées un peu partout finissent de surprendre le spectateur, qui se dit depuis le début de ces scènes « il a vraiment pensé à tout ».




Pour couronner le tout, la bande son originale de The Shining est reprise (heureusement d’ailleurs). Ces scènes permettent au spectateur qui n’a pas vu The Shining d’avoir une première approche de l’atmosphère générale du film et du cinéma de Kubrick, le tout sur un ton plutôt humoristique en raison des nombreuses gaffes que réalise Aesh lors de son évolution dans l’hôtel. Quant au spectateur qui a vu The Shining, cela lui permet de se remettre dans cette atmosphère, si particulière des films de Stanley Kubrick…

Des références partout

Comme je l’ai dit un peu plus haut, Steven Spielberg a incorporé dans ce film des tas de références, faisant souvent écho aux années 80’. Je trouve cela très intéressant d’incorporer cette époque, de par la diversité et la créativité incroyables de ce temps mais également pour symboliser le mélange de culture et/ou d’ethnie au sein de l’Oasis. En effet, l’Oasis étant un monde entièrement virtuel, le spectateur peut au début s’imaginer un endroit sinistre et totalement vide de sens et de sentiments. Toutes ces références apportent de la chaleur à ce royaume virtuel et surtout permettent de lui donner une identité. L’Oasis s’appelle ainsi car c’est ici que l’Humanité est implantée et c’est ici qu’elle vit et installe ses centres d’intérêts. L’Oasis représente un peu la carte d’identité de l’ensemble de la civilisation humaine.



Ainsi, nous retrouvons des références iconiques des années 80’. En plus des films de Kubrick, il y a également un hommage pour un ancien film de Spielberg: Back to the Future.
En plus de faire de la pub gratuite au réalisateur (pratique, il possédait tous les droits), les références apportent un sentiment de nostalgie pour les fans de Spielberg. La Dolorean apparaît à plusieurs reprises dans le film. C’est le véhicule de Parzival, symbole de sa grande passion pour la pop-culture. De plus, quelques thèmes musicaux de Back to the Future apparaissent brièvement à un moment du film.



Au moment de la grande course au début du film, de nombreuses références de films apparaissent, tels que King Kong et Godzilla. Il y a également des références à de nombreux jeux vidéos, notamment un grand hommage à ceux de la console Atari 2600, qui a marqué plusieurs générations. Il y a également quelques brèves apparitions de personnages de jeux vidéos, tel qu’un personnage d’Overwatch.

En bref, je trouve que Ready Player One est un film très réussi, s’il n’est pas excellent. Nous avons une superbe bande-son, des décors époustouflants et colorés pour ceux de l’Oasis, ainsi qu’un très bon scénario et de grands messages. En effet, les épreuves de James Halliday ont permis à Parzival et à tous ses amis de grandir, et ce en visionnant les souvenirs d’Halliday ainsi que ses pires erreurs. En se documentant, Parzival a pu découvrir la véritable personne qu’était James Halliday. Même s’il avait créé un jeu qui l’avait rendu célèbre et vénéré de son public, il demeurait néanmoins un être humain, avec des défauts. Il a fait des erreurs dans sa vie que Parzival ne reproduira pas. Ces épreuves lui ont permis d’avoir confiance en lui, d’accepter la personne qu’il était et de ne pas répéter les mêmes erreurs que lui ; autrement dit, il a appris à ne pas hésiter à se lancer. Un super message transmis au spectateur qui prend lui aussi une leçon de vie, avec au passage un bon bain dans la culture cinéma et pop des années 80’ !

Un excellent film que je recommande très fortement. A regarder entre amis ou en famille !

         5 étoiles. Vous vous y attendiez non ?