Her de Spike Jonze

Her est un film d’anticipation écrit et réalisé par Spike Jonze, et sorti en 2013.
Même si c’est un thème futuriste qui y est abordé, ce long-métrage n’a utilisé que très peu d’effets spéciaux numériques. En effet, seuls quelques immeubles et projections holographique ont été rajoutés en post-production. Cela a donc engendré certaines contraintes car il a fallu que le réalisateur planifie les jours de tournages en fonction de la météo : "On a cherché des intérieurs baignés de lumière naturelle. Cela a créé une difficulté supplémentaire puisqu'il fallait qu'on planifie le tournage en fonction de la lune et du soleil et que le chef décorateur a dû aménager ces espaces existants."

Dans un futur proche, Theodore, joué par Joaquin Phoenix, travaille dans un entreprise en tant qu’écrivain public de lettres amoureuses, amicales ou familiales. Depuis que sa femme l’a quitté, il se retrouve seul dans une mélancolie inconsolable. Mais un jour, lors de son trajet quotidien, il apprend l’existence d’un programme informatique de communication personnalisable. Après quelques questions le concernant, Theodore fait la connaissance de l’intelligence artificielle nommée "Samantha" qui apprend déjà à s’adapter dès son installation. Il est d’abord impressionné par les capacités du système. Samantha, interprétée par Scarlett Johansson, est la seule personne qui l’écoute et le comprend. Au fil du temps, une certaine relation s’installe entre eux. Elle est si empathique avec lui qu’il en tombe amoureux. Mais cette relation amoureuse qui paraissait parfaite au premiers abords se complique peu à peu. Ce film aborde toutes les faces d’une relation allant de la tendresse à la jalousie.

Her est à la fois un film d’anticipation mais aussi poétique que ce soit dans la mise en scène ou dans le scénario.
Tout d’abord, ce long-métrage nous propose de très beaux décors réalisés par K.K. Barrett, le chef décorateur, et Hoyle Van Hoytema, le directeur de la photographie qui a aussi participé dans Interstellar, 007 Spectre et Tenet. En effet, même si aux premiers abords nous nous attendons plus à une immense ville ternie par la pollution, ce sont des couleurs plutôt vives qui dominent l’écran. Par  exemple, la verdure règne sur les décors filmés bien que Her ait été tournée dans Los Angeles. Cette vive coloration n’apparaît pas seulement dans les rues de la ville mais aussi dans certains décors intérieurs et dans les vêtements des personnages. Je pense notamment à l’open space dans lequel travaille Theodore dont les teintes roses triomphent sur les autres. Mais aussi aux chemises du personnage principal qui sont autant colorées que les éléments précédents. À l’inverse, son appartement est très simple et plutôt vide.
Ces forts contrastes de couleurs donne un aspect d’imaginaire au film. Cette image de la ville utopique que nous montre le réalisateur à travers Her ne correspond pas à notre vision actuelle. Mais ce n’est pas la seule chose qui transmet cette sensation. Nous avons l’impression à la fois d’assister à des évènement futuriste et de revenir dans le passé. En effet, le sujet de l’intelligence artificielle appartient au monde de demain mais les objets ont un côté ancien. Par exemple, le téléphone qu’utilise Theodore est en partie en bois et se rapproche plus du design des smartphones des années 2000 plutôt que ceux actuels. Ou encore, on voit des ordinateurs assez épais contrairement à ce qu’il est fait aujourd’hui. On retrouve aussi cette différence d’époque le style vestimentaire des personnages, notamment celui des hommes qui portent des pantalons à taille haute à la mode dans les années 50.
Contrairement aux décors qui semblent sortir tout droit d’un rêve,  tout est fait pour que le comportement du système informatique autonome soit le plus réaliste possible et avec un caractère humain. Premièrement, aucun effets de robotisation ou d’intonations qui y feraient penser n’ont été rajoutés au splendide jeu vocale de Scarlett Johansson pour son interprétation de Samantha. Plus limpide que celle d’un interlocuteur au téléphone, sa voix retentit comme si elle se trouvait dans la pièce avec Theodore. On ressent alors toutes les émotions qu’elle nous transmet, que ça soit de la joie, de l’incompréhension ou même de la culpabilité. Son attitude aussi a quelque chose d’humain. En  effet, elle ne cesse d’apprendre par elle-même et de se poser de multiples questions. Elle prend fréquemment des nouvelles de Theodore et le réconforte quand il ne se sent pas bien. De plus, Samantha compose, écrit et chante des chansons pour son bien-aimé. Tous ces éléments donne un aspect très anthropique à leur relation alors ce n’est absolument pas le cas physiquement.



À travers l’aspect léger de Her, Spike Jonze évoque un sujet concret et profond : le physique est-il nécessaire dans une relation ? Tout dans ce film nous laisse à penser que ce n’est pas le cas. En effet, tous les sentiments que véhicule une liaison amoureuse, qu’ils soient positifs ou négatifs, sont présents dans cette histoire entre homme et machine. De plus, ce rapport semble parfait aux premiers abords puisque le programme informatique s’adapte à la personnalité de l’utilisateur et que, contrairement à l’Homme, elle ne possède pas de défaut. Mais ce film ne traite pas seulement  des relations amoureuses. Il évoque aussi les rapides progrès de la technologie, notamment au niveau de l’intelligence artificielle. Her nous remet donc en question sur l’utilisation des nouvelles technologies et leurs conséquences. Même si tout est fait pour paraître imaginaire, nous ne pouvons pas nous empêcher de nous dire que peu à peu nous nous rapprochons de cette réalité où chacun parle à son écouteur dans son coin.

Je vous conseille fortement d’aller voir ce film de poésie anticipatrice qu’est Her.